Depuis bientôt quinze ans, mes collègues et moi œuvrons au mieux de notre capacité à faire de Pyxis une entreprise où l’on cultive soigneusement le développement de chacun vers son plein potentiel. Bien sûr, notre aventure comporte des hauts et des bas, voire des moments de grande souffrance et de désarroi. Cela dit, dans la mesure du possible, nous restons ancrés dans cette intention que nous croyons noble et qui permet de donner du sens à notre activité quotidienne :

  • nous pratiquons notre métier et partageons notre savoir-faire avec discipline, plaisir et passion;
  • nous créons des solutions logicielles et organisationnelles simplement brillantes qui améliorent la vie des équipes et des utilisateurs.

Mais dans la vraie vie…

Poursuivies de façon délibérée, ces intentions nous ont amenés à expérimenter des approches de gestion qui sortent des sentiers battus. Comme mentionné précédemment, ce n’est pas toujours avec succès, mais nous apprenons beaucoup, entre autres à propos de nous-mêmes.

Ainsi, lors de conférences, de cours ou d’ateliers que j’anime, il n’est pas rare que quelqu’un me pose une question qui commence par quelque chose comme : « Mais dans la vraie vie…? » J’ai encore parfois un petit spasme et le discours intérieur suivant : « Tu crois que je ne suis pas dans la vraie vie ou quoi? » Lorsque j’écoute la question en laissant place à l’empathie, j’entends un sentiment d’impuissance et, dans certains cas, une pointe de désespoir.

Un thème général qui amène ce type de réaction est l’invitation à être transparent au sujet de ses émotions et à se montrer vulnérable. J’aime beaucoup la citation suivante de Brené Brown “Vulnerability is the birthplace of innovation, creativity, and change.” (La vulnérabilité, c’est le berceau de l’innovation, de la créativité et du changement.) Selon moi, celle-ci est malheureusement reçue par plusieurs comme une idée radicale, voire farfelue.

J’ai l’intime conviction que nous sommes des êtres de relation et que les émotions sont un moteur essentiel de nos vies. Elles sont une expression essentielle de qui nous sommes. Elles nous permettent de communiquer. Des émotions positives témoignent d’un besoin comblé et les émotions négatives témoignent du contraire. Il peut paraître étonnant qu’on veuille les cacher mais quand on y pense, elles révèlent qui nous sommes profondément et cela est à la fois exaltant et effrayant. Pour ma part, je sais que lorsque je souhaite cacher ou ignorer mes émotions, c’est que je suis en train de voiler ou d’ignorer qui je suis vraiment. Même si je suis persuadé qu’il est souvent contre-productif et même contre nature d’étouffer ou de mettre de côté mes émotions, je n’arrive évidemment pas toujours à ne pas le faire.

Je suis triste de constater à quel point nous avons créé des environnements de travail anémiques sur le plan émotionnel; c’est-à-dire au sein desquels nous mettons un masque ou une carapace dès que nous franchissons la porte. Je vous invite à vous poser les questions suivantes : Comment interprétez-vous un geste simple comme celui d’offrir un signe d’appréciation dans votre milieu de travail? Trouvez-vous que c’est bizarre? Que c’est une perte de temps? Autre chose?

Imaginez maintenant que vous êtes en train de donner un câlin à un collègue que vous aimez bien et que vous n’avez pas vu depuis un certain temps. Qu’est-ce que cette idée génère en vous? Que penseraient vos collègues en vous voyant faire? Peut-être trouveraient-ils que cela n’a pas sa place, que c’est carrément bizarre ou même puéril…

D’où viennent ces réactions ou ce sentiment d’impuissance?

C’est une question très complexe qui est en partie liée à notre époque et à où nous en sommes en matière d’évolution humaine. J’aimerais offrir une perspective précise que j’espère pragmatique et qui permettra à chacun d’explorer ses propres réactions.

Chacun d’entre nous a une façon bien personnelle d’aborder cette question qui est conditionnée par qui nous sommes (notre personnalité, notre bagage génétique, etc.) et aussi par notre histoire de vie. La plupart d’entre nous ont une grande capacité à s’inventer des histoires qui valident comment les circonstances et les autres sont la source de leurs difficultés et des limites dans leur vie. Il y a bien sûr une part de vérité dans ces histoires. Toutefois, en particulier en étudiant les théories du développement de l’adulte comme celle de Robert Kegan, j’en suis venu à croire que les freins les plus importants sont à l’intérieur de nous-mêmes.

Ainsi, je vous propose d’explorer de façon individuelle ou avec quelques collègues la question suivante : « Quelle est l’expérimentation à haut potentiel que je n’ai toujours pas osé faire? » Je vous propose ensuite de vous demander : « Par crainte de quoi? » Et encore : « Par crainte de quoi? » et ainsi de suite. Je vous invite à ressentir plus qu’à réfléchir.

Révélateur de soi, cet exercice peut être vu comme une version simplifiée du processus d’immunité au changement (ou immunothérapie du changement) développé par Robert Kegan et Lisa Lahey. Il est présenté dans le billet Allergique au changement? C’est possible et ça se soigne! de mon collègue Tremeur. J’espère qu’il vous sera utile et qu’il vous donnera des clés pour favoriser votre compréhension de vos propres résistances, vos propres masques que vous revêtez sans même vous en apercevoir. Je serais bien sûr ravi de recevoir des partages. Bien sûr, si vous souhaitez participer à notre atelier d’immunité au changement, n’hésitez pas à communiquer avec moi, Tremeur ou Hélène.

Et maintenant!

Pour conclure ce billet, je me permets de vous partager une note d’un collègue après une séance de travail géniale cette semaine et qui m’a inspiré l’écriture du présent billet :

J’ai été pris d’une émotion en sortant de chez moi pour aller prendre le bus. Je me suis senti comme si j’allais sortir de ma bulle parfaite et sortir dans le vrai monde. Pis je me suis dit, pantoute! La vraie vie c’est ça! C’est maintenant! Je vis ce qu’il y a à vivre sans condition. Sans me conditionner à ce que ça devrait être. Même si le bus va peut-être prendre plus de temps parce que je ne suis pas sur les heures des express, ça ne mérite pas que je m’empêche de vivre maintenant.

J’attends le bus et je me sens bien. Je me sens différent, mais en même temps témoin de l’instant. C’est comme si j’étais un client VIP derrière la scène et que je voyais le show en même temps que je le vis et que je vois les rouages.

Le bus arrive. Il est presque vide. Pas de trafic. Ça roule vite. J’ai pas l’impression que je devrais être ailleurs. Ce n’est pas faux pantoute à mes yeux!

Pour moi, la vie c’est maintenant! Et pour vous?

François Beauregard

J’ai une curiosité audacieuse, voire naïve, et je suis un grand explorateur du connu conventionnel. Inspiré par la déstabilisation du convenu et les ouvertures générées par la mise en lumière douce des perceptions d’incohérences, je suis convaincu que des possibilités attendent d’être réalisées bien au-delà – ou en deçà – de nos champs de vision.

Je suis passionné par le développement de logiciels et les organisations humaines. J’aime contribuer à des projets dont l’intention est d’explorer de nouveaux modes de fonctionnement et de gouvernance, tout en cherchant à maximiser la qualité de vie et la satisfaction personnelle de tous les participants.

Comme moi, peut-être êtes-vous intrigué.e par le phénomène de formation du “je” dont on parle dans une bio ?

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