Toute transformation, qu’elle soit de nature organisationnelle ou individuelle, nécessite une transition, un passage obligatoire, parfois accompagné de souffrance et de détresse psychologique.

 

Pour autant, devons-nous subir une quelconque forme de détresse ou de souffrance avant d’oser provoquer un véritable changement? Quel rôle joue la souffrance dans ce processus et est-ce soutenable? Comment les gestionnaires et les responsables des ressources humaines peuvent-ils soutenir un changement durable chez nos talents? Les prochains paragraphes tenteront de répondre à toutes ces questions à l’aide de concepts chers à la psychologie positive et aux neurosciences, comme le rôle des émotions sur le cerveau et les comportements.

 

L’évolution de carrière : un mal pour un bien?

Je me souviendrai toujours de l’histoire de ce directeur qui, durant les premières années à son nouveau poste de direction, avait beaucoup souffert. Comme plusieurs, il avait été promu, car il faisait bonne figure dans son rôle de membre d’équipe; après de nombreuses années de grande loyauté au sein de cette même entreprise, on lui avait offert ce poste de direction. Le passage d’employé performant à dirigeant n’est toutefois jamais si simple à effectuer, et, après diverses tergiversations managériales, il s’enquit d’une aide particulière pour être accompagné dans cette aventure professionnelle. Après quoi, il se forma auprès d’autres gestionnaires afin de développer ses capacités de gestionnaire en suivant une formation de leadership. Était-il obligé d’avoir mal avant d’aller chercher de l’aide?

 

Savoir interpréter les maux du corps…

La douleur, la détresse, est souvent un signal à ne pas négliger qui nous avise en quelque sorte que la situation n’est pas uniquement au stade de la préoccupation, mais qu’il faut y apporter une attention particulière. Cet état, ou impression négative, est appelé, notamment par Richard Boyatzis, chercheur et psychologue émérite dans le domaine de l’intelligence émotionnelle, des comportements organisationnels et de la science cognitive, NEA, pour Negative Emotional Attractor. Le NEA est un état généralement associé à des sensations de stress, de nervosité et, parfois, d’un sentiment d’être sur la défense. On peut également lier l’état de NEA au mode fight or flight (attaque ou fuite). Nous ressentons alors souvent un serrement à la gorge, aux mâchoires, une lourdeur dans les épaules et, surtout, la pression artérielle qui augmente fortement, tout comme la respiration. Le corps se prépare au combat. Le sang se précipite vers les grands groupes musculaires prêts pour la défense, ce qui réduit toute possibilité de créer de nouvelles connexions neuronales et bloque par la même occasion la capacité à apprendre.

L’état de NEA nous pousse certes à trouver des solutions à nos problèmes, à résoudre ce qui ne fonctionne pas et même à focaliser précisément sur une tâche, à analyser et à user de son énergie mentale. Mais ce n’est pas un état favorisant l’émergence ou l’accès à de nouvelles idées, de nouvelles personnes et de nouvelles possibilités.

 

… pour mieux faire face aux situations de détresse

Il nous faut trouver la volonté, la force, de passer à l’état appelé PEA, pour Positive Emotional Attractor, pour inspirer un réel vent de changement. Et, pour cela, il nous faut toucher à nos idéaux, à nos rêves et à nos espoirs d’un futur meilleur, à notre grand Why. Un état de PEA se traduit par un ralentissement de la respiration, une diminution de la pression artérielle et, ainsi, un sentiment de bien-être qui se met en branle, boostant notre système immunitaire au passage. Un sentiment de calme, d’optimisme et d’espoir amplifie également la recherche et la découverte de solutions innovantes et créatives.

 

Réussir à passer du stade de NEA à celui de PEA

L’état de NEA demeure pertinent dans la mesure où il active une réponse analytique chez l’individu confronté à un défi. Il n’en demeure pas moins que la douleur n’est pas un état soutenant l’apprentissage, l’acquisition de nouveaux savoirs ou l’adoption de nouvelles attitudes ou de nouveaux comportements. L’apprenant, pour saisir et développer toutes nouvelles possibilités, doit être dans un état de calme et de sécurité pour s’ouvrir au changement et susciter une transformation durable. Lorsqu’on se sent en sécurité, on peut alors être totalement actif dans le processus.

C’est pourquoi, dans un processus d’accompagnement, il nous faut nous assurer que l’apprenant, ou l’individu, passe du stade de NEA à celui de PEA et l’aider à provoquer un réel changement. Et, pour ce faire, il faut miser et focaliser sur son idéal de soi. Carburer au rêve, à l’espoir et à un idéal de soi motive et énergise l’individu à se propulser au-delà de ses peurs et permet une transformation durable. Le goal setting, c’est-à-dire le focus sur les objectifs lorsque l’on offre autant de la rétroaction que de l’accompagnement de coach, active le cerveau analytique, mais pas le cœur. Le goal setting en coaching est certainement révolu, et ce, depuis longtemps! Le coaching associé à la tendance issue de la psychologie positive et des neurosciences nous indique qu’un état de PEA favorise un réel épanouissement et inspire une transformation durable. Il faut désormais faire place à l’intention, plus noble, ou au purpose, plus motivant, et moins encadrant qu’un objectif. Et c’est en coachant avec compassion qu’il nous est permis d’avoir un plus grand impact. Il nous faut avoir à cœur la transformation et la croissance de l’autre. Tout ce qui touche la gratitude et la compassion est une voie rapide vers un état de PEA, comme l’évoque souvent Boyatzis.

La recherche nous informe également que nous pouvons induire des états de PEA simplement par la pratique de la respiration consciente, du yoga, du tai-chi, d’un exercice physique modéré et de la marche en nature, pour ne nommer que quelques exemples.

Comment pouvons-nous, en tant que gestionnaire, responsable des ressources humaines ou coach, entretenir un sentiment de sécurité psychologique chez nos talents? On peut commencer par les laisser voir que nous sommes nous aussi humains, que nous avons nous aussi parfois fait des erreurs (dont nous avons appris!), en admettant nos torts, nos faiblesses et, surtout, notre vulnérabilité. Autrement, soyez curieux!! Posez beaucoup de questions à vos collègues pour apprendre à mieux les connaître, également sur leur travail, leurs accomplissements et les leçons apprises de leurs succès comme de leurs échecs!

 

Et vous? Comment contribuez-vous à inspirer un sentiment de sécurité psychologique dans vos organisations et vos équipes?

Pour des conseils et de l’accompagnement en coaching, n’hésitez pas à faire appel à nos services ainsi qu’à jeter un coup d’œil à nos programmes pour les ressources humaines et les dirigeants ainsi qu’à la formation Introduction à la facilitation!

 

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Pour aller plus loin :

Boyatzis, Richard. Helping People Change: Coaching with Compassion for Lifelong Learning and Growth.

Zélia Lefebvre

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